Savez-vous ce qu’est la dépense gachée et l’escalade d’engagment? Savez-vous que ces deux phénomènes, liés, vous font perdre énormément de temps, d’énergie, de disponibilité, d’argent… justement en voulant en économiser?
Voici l’explication…
Imaginez cette scène:
Vous êtes un homme de la préhistoire et vous devez chercher de la nourriture. Vous vous engagez dans une marche à pied pour aller chercher de quoi manger, des animaux à chasser. Vous vous éloignez de la maison, de plus en plus loin… Manifestement vous n’allez pas dans une direction très riche en animaux sauvages. Vous n’allez pas vers un lieu très prometteur car vous ne rencontrez rien d’intéressant, mais alors rien. Que faites-vous? Vous retournez sur vos pas et vous prendrez alors un autre chemin? Il y a des chances que non, vous allez continuer, en colère contre la nature et les évènements mais vous allez persister, vous acharner même.
C’est ce phénomène, simple à comprendre, que l’on nomme en psychologie sociale la dépense gâchée, et son corollaire, l’escalade d’engagement.
Petite explication:
La sélection naturelle a privilégié les êtres qui ne dépensaient pas inutilement leurs ressources. Si vous vous engagez sur un chemin, vous dépenserez de l’énergie, qui sera largement compensée par la nourriture qui vous attend. Mais si il n’y a rien? La personne pourrait revenir sur ses pas et chercher ailleurs. Mais vous aurez alors beaucoup dépensé pour RIEN. Et ça ce n’est pas acceptable dans notre « programmation » cérébrale. Donc ce programme mental va agir: « continue, acharne toi si il le faut mais il faut obtenir quelques chose en retour de ce que tu as investi ». Dans un monde basé sur la survie et l’économie, face à une situation où l’incertitude est grande, retourner en arrière sans rien regretter est une aberration, et continuer avec la volonté de ne pas avoir fait tout ça pour rien est… une aberration, mais moindre!
C’est le phénomène de la dépense gâchée: nous investissons quelque chose (temps, énergie, ressources) mais nous n’avons pas les bénéfices en retour.
Cela entraîne une escalade d’engagement: je vais encore plus loin pour obtenir quelque chose, donc je dépense encore plus. Je n’ai toujours pas de retour, donc il est encore moins question que j’abandonne, je dépense encore plus etc. Souvent le drame est au bout du chemin (surtout si l’investissement est financier).
Maintenant pensez à des situations où ce genre de phénomène vous arrive:
-Exemple connu de l’attente du bus: Vous hésitez à rentrer à pied ou attendre le bus. Vous choisissez de l’attendre. Il ne vient pas. Vous êtes de plus en plus énervé mais vous attendrez encore, et n’en démordrez pas. Il arrive avec 2h30 de retard. Résultat vous êtes arrivés avec 2h30 de retard chez vous alors que si vous aviez abandonné l’idée de l’attendre, même au bout de 40min, vous seriez arrivé chez vous qu’avec 1h de retard…
-Exemple connu plus lourd de conséquences, en entreprise: Le chef d’entreprise prend la décision d’investir dans un projet immobilier sur 2 ans. Cela lui coûte 200 000 euros d’investissement. Résultat au bout de 2 ans et demi, le projet s’avère être un fiasco absolu. Il n’y a absolument pas les bénéfices attendus, car le retour n’est que de 20 000 euros, soit un dixième de ce qui a été investi. Les pronostics ne sont pas très réjouissants: l’entreprise n’y gagnera pas grand chose de plus. On a acheté au mauvais endroit. Conséquences? Le chef d’entreprise a de fortes probabilités de faire une escalade d’engagement. Il va investir 100 000 euros de plus dans son projet immobilier en espérant le rendre plus rentable. La catastrophe commence vraiment à ce moment là…
Pour éviter les effets pervers de ce processus automatique, voici ce que je vous conseille:
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D’identifier à l’avance les situations qui pourraient déclencher votre réaction automatique d’escalade d’engagement (difficile a priori).
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De chercher les moindres bénéfices secondaires à ce que l’on a fait et investi. Absolument tout est bon à prendre: j’ai obtenu une information capitale, cela m’a permis d’apprendre, je vais me servir de ce que j’ai fait mais pour un tout autre but que celui qui était fixé à l’origine…
Le but est de trouver des bénéfices a posteriori de ce qu’on a investi. L’escalade d’engagement pourra être enrayé, et vous aurez même identifié des bénéfices parfois plus intéressants que ceux d’origine!
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De toujours réfléchir à la situation dès que vous devez réinvestir dans quelque chose: « Ne vais-je pas m’enfoncer un peu plus? Que ferait une personne extérieure qui n’aurait rien investit et qui prendrai ma place en ce moment? »
Dernier point, faites attention à votre attitude vis à vis de ceux qui vous observent. Nous avons tendance à persister dans une décision surtout si d’autres personnes connaissent notre décision. Nous n’aimons pas paraître « girouette » et nous avons une sorte de pression sociale qui nous pousse à continuer ce que nous faisons déjà. Expliquez-vous devant ceux qui sont concernés de votre changement d’attitude: vous avez des informations nouvelles, la situation n’est pas celle attendue, vous avez un nouveau plan plus adapté.
« Errare humanum est, perseverare diabolicum »
Quel excellent sujet!
Traité avec clarté, il ouvre nos yeux sur nos comportements. Ce concept de « dépense gachée » et d' »escalade d’engagement » se voit quotidiennement tout autour de nous. Je ne le connaissais pas mais, avec un peu d’humilité, faut avouer que je ne peux nier que ça m’est arrivé aussi!
Quand on prend conscience, on peut agir ou, dans ce cas-ci, réagir! Le sujet est vraiment d’actualité: il nous est facile d’identifier un tas de situations pénibles qui ont été causé par ce phénomène: projet politique, évènements spéciaux qui défoncent (pulvérisent) les budgets par entêtement ou refus de remise en question (ce qui demande également un peu d’humilité de la part des dirigeants), etc.
Bref, (encore une fois) à te lire, je découvre et j’apprends, avec plaisir.
Bonne journée!
Benoît